Quelques dizaines de décès par an le long de nos côtes, cela n’est pas énorme au regard du nombre de ceux qui vont sur la mer. C’est pourtant le principal péril mortel qu’on encourt en naviguant. C’est donc une responsabilité essentielle du skipper que de se remémorer régulièrement cette manœuvre. Comme aucune mémoire n’est infaillible, on ne saurait trop recommander de garder à bord, sous la main, la description de cette manœuvre telle qu’elle figure dans un prochain article.
La manœuvre de récupération de l’homme à la mer présente des différences suivant que l’on navigue au moteur ou à la voile. Elles sont décrites ci-dessous. Il y a cependant des règles communes à appliquer immédiatement dans les deux cas :
- Avant le départ, exposer la manœuvre à tous les équipiers et leur montrer comment arrêter et démarrer le moteur (l’homme à la mer peut être le chef de bord).
- Exiger le port du gilet de sauvetage et, de nuit ou par météo difficile, du harnais pour toute personne sur le pont. De nuit, porter également un « flash light » au poignet.
- Au moment de l’accident: crier « homme à la mer », en précisant le bord.
- Charger un équipier d’assurer un contact visuel permanent, à l’exclusion de toute autre tâche.
- Baliser le lieu de l’accident en lançant la bouée couronne ou, si possible, la perche IOR
- Appuyer sur la touche MOB (man over board) du GPS et noter la position.
En l’absence de GPS, effectuer un relèvement au compas. - Engager la manœuvre de récupération (voir ci-contre au moteur ou à la voile).
Pour la récupération proprement dite, l’échelle de bain sera commode si l’accidenté est en mesure d’embarquer par ses propres moyens. Sinon, on pourra utiliser l’annexe, et/ou le palan d’écoute de grand-voile en débordant la bôme. Attention en hissant l’homme à bord de bien le prendre sous les aisselles et de protéger sa tête de chocs éventuels. Dans tous les cas, éviter de plonger en risquant un deuxième équipier à la mer. - En cas d’échec de la récupération dans les 5 minutes suivant l’accident, déclencher l’alerte: VHF canal 16 et tir de fusées.
- Poursuivre les recherches en quadrillant la zone pendant au moins 6 heures
- Inscrire sur le livre de bord l’heure et la position géographique de l’accident ainsi que le parcours des manœuvres effectuées.
Au moteur
La manœuvre de récupération de l’homme à la mer au moteur est connue de tous les marins du monde sous le nom de « manœuvre de Boutakoff » du nom de l’officier de marine russe qui l’a codifiée. De tous les marins? Pas tout à fait. Les anglais ont donné à la même manœuvre le nom de leur compatriote Williamson: « The Williamson Turn ». Dès que l’accident se produit, virer de 90° du côté où l’homme est tombé (on évite ainsi en faisant « déraper le bateau » qu’il se prenne dans l’hélice). Virer ensuite trois fois du côté opposé pour parcourir un rectangle qui remet le cap sur l’équipier tombé. Dans cette dernière longueur, réduire la vitesse pour arriver arrêté au vent de l’homme à la mer.
A la voile et au moteur
Courir grand largue, en choquant la grand-voile et en abattant si on était plus près du vent. Amener ou enrouler la voile d’avant (foc ou spi). Mettre le moteur en route. Border la grand-voile dans l’axe et empanner. Remonter dans le lit du vent en direction de l’homme à la mer. Si le vent est fort, amener la grand voile pendant cette remontée. Aborder l’homme à son vent en ayant réduit la vitesse pour s’arrêter à sa hauteur. ..
A la voile uniquement
Le moteur peut refuser de démarrer ou, c’est hélas fréquent, un bout s’est engagé dans l’hélice dans la confusion de l’accident et des premières phases de la manœuvre. Il faut alors manœuvrer à la voile sans s’affoler. La meilleure solution est de revenir vers le naufragé au près bon plein en choquant les voiles pour ralentir. Si le vent est fort et que le bateau est manœuvrant sous grand-voile seule, on amènera le foc. On se présente au vent du naufragé. Il faut amener la grand-voile dès qu’on est positionné pour éviter qu’elle fasse abattre et reprendre de la vitesse.
Par vent fort, une autre méthode d’approche est intéressante. Il s’agit de repasser près du naufragé au près sous son vent, de loffer en ralentissant légèrement, puis de virer en choquant la grand-voile, en gardant le foc à contre, et en laissant la barre sous le vent (au vent pour une barre à roue)pour se présenter à la cape au vent du naufragé, grand-voile bordée.
Cette approche, si elle est réussie, a l’avantage de procéder à la récupération depuis un bateau arrêté sans voile qui faseye.
Avec l’aimable autorisation de Caroline Serre, secrétaire de rédaction de « Sauvetage » magazine de la SNSM.